Cours 2025: « Nous sommes pleinement satisfaits du déroulement de ces quatre ateliers »

Pour le deuxième trimestre de l’année 2025, le Centre d’Art avait programmé quatre ateliers dans les départements du Sud et du Nord. Une réussite remarquable, en dépit des défis rencontrés.
ENTRETIEN AVEC ALLENBY AUGUSTIN
Directeur exécutif du Centre d’Art
Bilan des ateliers dans le Nord et le Sud – 1ère session 2025
Le Centre d’Art a organisé quatre ateliers pour cette première session de l’année 2025, dont deux dans le Nord et deux dans le Sud. Ces activités viennent tout juste de s’achever. Considérez-vous qu’elles ont été une réussite ?
Allenby Augustin.- Nous sommes plus que satisfaits du déroulement de ces quatre ateliers, tant dans le Nord que dans le Sud, d’autant plus qu’ils se sont tenus dans un contexte exigeant. Malgré les défis, l’engouement a été remarquable, avec un nombre élevé de demandes de participation dans toutes les zones. Tous les ateliers ont rencontré un grand succès, confirmant l’intérêt et l’adhésion des participants. Cette première session 2025 est une belle réussite, et nous en tirons une grande satisfaction.
L’atelier de sculpture a véritablement été la sensation de cette session, réunissant près de 16 participants – majoritairement des femmes et des jeunes filles – avec une étonnante rapidité d’apprentissage. Vous attendiez-vous à un tel engouement et à de tels résultats ?
Allenby Augustin.- L’atelier de sculpture a effectivement dépassé toutes nos attentes, tant par son succès que par son impact. C’était la première fois que le Sud accueillait un atelier de sculpture, et le fait qu’il ait été animé par André Eugène, l’un des instigateurs du mouvement des artistes de la Grand Rue de Port-au-Prince, dont le travail a porté Haïti sur la scène artistique internationale, a suscité un immense enthousiasme. La forte participation, notamment des femmes et des jeunes filles, prouve une fois de plus que l’art doit être utile et accessible à tous, une valeur que le Centre d’Art s’attache à promouvoir à travers ses actions.


Des participants à l’œuvre dans l’atelier de sculpture animé par le plasticien André Eugène
Mais au-delà des chiffres, ce qui nous remplit particulièrement de fierté, c’est la création d’un nouveau noyau artistique dans le Sud, une dynamique encore rare dans cette région. Nous tenons à remercier chaleureusement André Eugène pour son professionnalisme et son engagement, ainsi que tous ces jeunes talentueux de Port-Salut qui se sont ouverts à de nouvelles pratiques artistiques. Leur soif d’apprentissage et leur créativité nous confortent dans notre mission, et nous avons hâte de poursuivre cette aventure à leurs côtés pour les accompagner encore davantage dans cette voie prometteuse.
Vous avez personnellement visité cet atelier qui, contre toute attente, a surpassé les attentes. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors de cette visite ?
Allenby Augustin.- Ce qui m’a le plus marqué lors de cette visite, c’est la rapidité avec laquelle ces jeunes — dont beaucoup n’avaient jamais touché à la sculpture auparavant — ont su appréhender les techniques et s’approprier cet art. Leur facilité d’apprentissage était tout simplement impressionnante, à tel point que j’avoue avoir été bluffé ! Voir leur concentration, leur enthousiasme et leur créativité s’exprimer en si peu de temps a été une véritable révélation. Cela confirme non seulement le potentiel immense de ces talents, mais aussi l’importance de rendre l’art accessible, surtout dans des régions comme le Sud où les opportunités manquent. Une expérience humainement et artistiquement inspirante.
Bien que ces ateliers aient été organisés dans différentes régions du pays, ils restent largement dépendants de Port-au-Prince, qui fait face à d’importantes difficultés logistiques et sécuritaires. Quels ont été les principaux défis rencontrés lors de la mise en œuvre de ces ateliers ?
Allenby Augustin.- Effectivement, la situation sécuritaire et logistique a représenté un défi majeur dans l’organisation de ces ateliers. Quitter Port-au-Prince est devenu extrêmement complexe, et l’acheminement du matériel vers certaines régions où il n’est pas toujours disponible localement a requis des efforts considérables. Malgré ces obstacles, la détermination de nos équipes et des participants a permis de surmonter ces difficultés. Et les résultats obtenus ont, de loin, compensé tous ces défis !
Plutôt que de nous attarder sur les contraintes, nous choisissons de retenir les points positifs : l’engouement des communautés locales, la qualité des échanges artistiques, et surtout, l’émergence de nouveaux talents dans des zones souvent marginalisées. Ces succès nous motivent à persévérer, à nous adapter, et à renforcer notre présence sur le terrain, malgré le contexte. L’art, une fois encore, a prouvé sa capacité à transcender les barrières.


Des participants aux ateliers animés par les plasticiens Frantz Zéphirin et Maksaens Denis
Quelles collaborations ou partenariats locaux ont facilité la réalisation de ces ateliers, et comment envisagez-vous de les développer à l’avenir ?
Allenby Augustin.- Dans le Sud comme dans le Nord, ces ateliers n’auraient pu voir le jour sans l’engagement précieux de partenaires locaux profondément investis dans la vie culturelle de leurs communautés. Au Nord, nous avons pu compter sur le soutien déterminant de Bozar-Cap, qui a facilité notre ancrage territorial, ainsi que de l’Alliance Française de Cap-Haïtien. Au Sud, l’énergie des jeunes photographes des Cayes a été exemplaire : leur formation a même abouti à la création d’un collectif, une belle preuve d’appropriation durable !
Je tiens également à saluer l’apport inestimable de partenaires individuels qui ont porté ce projet avec passion : Jisca-Mirna Louis, Ronel Macellus et Chelton Aïs. Leur expertise, leur réseau et leur conviction ont constitué des leviers indispensables.
Pour l’avenir, nous envisageons de formaliser ces collaborations par le biais de conventions et de programmes pluriannuels, tout en élargissant le cercle à d’autres acteurs locaux — écoles, mairies, entrepreneurs culturels — afin de pérenniser l’impact. L’objectif est de transformer ces synergies ponctuelles en un écosystème artistique solide, notamment dans le Sud où les besoins sont particulièrement criants.
Ces quatre ateliers organisés hors de la capitale ont constitué une première expérience — une expérience manifestement réussie. Envisagez-vous de programmer à nouveau d’autres ateliers dans ces régions, ou dans d’autres parties du pays ?
Allenby Augustin.- Tout à fait ! Ces quatre ateliers ne sont que la première étape d’une démarche que nous comptons bien amplifier. Dès septembre 2025, nous lancerons une deuxième session qui s’étendra jusqu’en décembre, avec pour objectif de pérenniser notre présence artistique en province. Mais rassurez-vous, cela ne signifie pas pour autant que nous délaisserons Port-au-Prince, où nous menons déjà des projets majeurs comme Ann Kwape Vyolans ak Lakilti, une initiative phare de cette année réalisée en partenariat avec l’OEA, le PADF et l’Ambassade du Canada.

Notre vision est claire : irriguer tout le territoire haïtien d’opportunités culturelles, sans exclusion. Le Sud, le Nord, et bientôt d’autres régions pourront ainsi bénéficier de nos interventions, tout en maintenant un ancrage solide dans la capitale. Car l’art doit être partout un droit, pas un privilège.