Le Centre d’Art fut à l’origine du premier journal sur les arts plastiques en Haïti 

Dewitt Peters. © Archive le Centre d’Art

Des choses importantes arrivent quotidiennement au Centre d’Art. Hier, par exemple, c’était la découverte d’un nouveau peintre « populaire » ; aujourd’hui, c’est un membre artiste qui nous apporte une nouvelle toile, montrant de ces progrès soudains qui caractérisent si souvent le travail des Haïtiens, quand ils reçoivent le stimulant de l’encouragement.

La renaissance des arts plastiques en Haïti date de la fondation du Centre d’Art, qui n’a que dix-huit mois d’existence. Le mouvement est si jeune, doué de vitalité, plein de surprises. Mais il lui a longtemps manqué un organe pour l’exprimer. Je salue la venue de STUDIO No. 3 et lui souhaite une vie longue, utile et vigoureuse.

Il est ainsi nommé d’après ce studio du Centre qui, depuis les premiers jours, a été un lieu de rencontre, démocratique et dynamique, pour le travail et la discussion. Je suis particulièrement heureux qu’il fasse son apparition à un moment où beaucoup de décisions d’une grande importance doivent être prises, et j’espère sincèrement qu’il deviendra un lien direct entre l’Administration du Centre et chacun de ses membres, un facteur vital pour la création d’un réel et durable esprit de corps.

Il y a un an et demi, le Centre d’Art commençait sa carrière avec deux grands avantages : l’absence dans le pays d’une académie d’art et l’esprit coopératif, éclairé, du Gouvernement qui, bien que nous aidant matériellement depuis le début, nous a toujours laissés libres, une attitude très différente de celle observée dans beaucoup d’autres pays où seul l’art « officiel » est encouragé, cet art « officiel » qui, dans les temps modernes, a été ordinairement un art mort-né. L’autre avantage, l’absence d’une académie, est une chance incalculable qui permet aux artistes et élèves haïtiens de commencer, avec un minimum de cette tradition « pompier » qui a porté le coup mortel à tant de jeunes talents, dans les autres pays.

En général, les artistes haïtiens ont beaucoup à apprendre, mais, par bonheur, peu à oublier. Un climat convenable pour le développement d’un art vraiment indigène est enfin créé.

Nous n’avons pas encore eu le temps de former des tempéraments authentiques, profondément artistiques ; mais je suis convaincu que dans un délai relativement court, Haïti produira des sujets ayant de larges connaissances et un développement général qui les désigneront pour prendre place parmi les artistes de réputation mondiale.

J’aimerais exprimer de sincères remerciements à Son Excellence Elie Lescot, Président de la République, aux Ministres et autres officiels du Gouvernement, de même qu’aux particuliers et aux institutions (trop nombreux pour qu’on puisse les mentionner ici), pour l’aide et l’encouragement qu’ils nous ont si généreusement accordés, aussi bien qu’à la Division de Coopération Intellectuelle du Département d’État des États-Unis, dont l’aide utile nous est transmise par l’intermédiaire amical de l’Institut Haïtiano-Américain. Assister à la naissance d’un art est une expérience unique et un grand privilège. Je sais que quand je dis ceci, je parle pour nous tous ici au Centre et, je suis presque sûr, pour tous nos amis d’Haïti et d’outre-mer.

« Pour saluer une naissance », texte de Dewitt Peters, tiré du premier numéro du STUDIO No. 3, paru en novembre 1945.